Machisme ordinaire.

 

On a déjeuné tous les trois, Marion, Romain et moi. On avait du temps. Pas de grosse commande en cours et la patronne en déplacement. On a discuté de tout et de rien. Je m'interroge souvent sur ces hommes qui se prétendent féministes. Il est vrai qu'aujourd'hui rares sont les hommes, du moins ceux qui ont une tribune, qui ne s'extasient pas devant les qualités des femmes pour déplorer la condition dans lesquelles la société les maintient. Même si, ici ou là, certains individus mal dégrossis continuent de dénigrer le féminisme, la très grande majorité des individus mâles se présente comme des défenseurs des droits des femmes. Romain est d'ailleurs passé expert en la matière. Il s'agit indéniablement d'une façon d'avancer masqué. 

 

 

Or, la situation de celles-ci n'évoluent plus depuis que les hommes ont adapté leurs discours et si on regarde l'époque précédente, on constate que des progrès énormes avaient été accomplis. Et, rappelons le, les féministes des années soixante et soixante-dix ne voulaient pas des hommes justement parce qu'elles les soupçonnaient de profiter de leur position, de fait, dominante, et surtout de leur habitude, héritée de milliers d'années, d'imposer leur parole aux femmes. Je crains que l'on assiste aujourd'hui à ce phénomène. Les hommes ont trouvé la parade pour pérenniser leur domination. On le voit dans l'érotisation croissante des tenues des jeunes filles, dans le désir des jeunes femmes de se consacrer pleinement à leur maternité en se mettant volontairement à temps partiel, dans le consumérisme général lié au féminin, dans l'évolution des emplois conquis par les femmes, ceux-ci sont immanquablement dévalorisés.

Là-dessus, Marion est d'accord avec moi. Je précise qu'elle a tenu à continuer à travailler à temps plein malgré ses enfants, c'est sans doute un signe de résistance de sa part au processus en cours. Elle laisse déclamer son mari mais n'en pense pas moins. Au contraire, elle prétend que tout cela n'est pas aussi dramatique que je le laisse entendre. Après tout, me dit-elle, s'il est machiste quelle différence cela fait? Aucune, c'est vrai. Sa question c'est plutôt de trouver le moyen de se réapproprier son espace intérieur qu'il a complètement façonné à sa manière. En attendant, Marion s'habille de façon de plus en plus sexy. Est-ce un signe ?

 

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