Féminité et pouvoir

Une manière féminine d'exercer le pouvoir ?

Marion a parfois des propos qui m'agacent. Trop souvent elle emballe les problèmes dans des mots ou des phrases et de les répéter à l'envi en feignant de croire qu'à force de les rabâcher les problèmes disparaîtront. C'est un symptôme de notre époque. On parle ainsi d'hétéro-patriarcat, de domination masculine, de machisme. Très bien. Mais au-delà de la dénonciation, que trouve-t-on? C'est bien ça le problème! Je prends l'exemple de la question des femmes et du pouvoir. Dans une belle unanimité la société déplore le manque de femmes aux postes de pouvoir. Je ne vais pas m'en plaindre mais je ne peux m'empêcher de constater que chaque fois qu'une femme parvient à un poste à très hautes responsabilités il lui est reproché de copier les comportements masculins. C'est ce qu'a fait Marion. Pour elle, une femme, en l'occurrence notre patronne, ne devrait pas faire preuve d'autoritarisme ni de cynisme. Reprocher à une femme de pouvoir de singer les hommes, ce n'est pas nouveau. Les hommes se sont toujours moqués des femmes qui tentaient de les rivaliser et n'ont jamais manqué de les affubler de qualificatifs désobligeants. Mais quand le reproche sort de la bouche des femmes, là je ne comprends plus.

 


 

Il y aurait une manière proprement féminine d'exercer le pouvoir ? Ce serait quoi ? La jupe ? Le tailleur ? Les talons hauts  ? Margareth Thatcher et Golda Meir s'affichaient en tailleur, cela ne les a pas empêchées de s'entendre reprocher qu'elles avaient des manières d'hommes. J'ai moi-même vu des femmes d'affaires  posées sur des louboutins à talons aiguilles et moulées dans des robes sexy insulter le personnel de leur entreprise comme ne le font pas tous les hommes. Alors en quoi le pouvoir féminin serait-il différent de celui des hommes ? Marion m'a débité tous les vieux clichés, les stéréotypes: les femmes seraient davantage dans l'écoute, le dialogue, la réflexion, l'organisation quand les hommes seraient davantage portés vers l'action, le mouvement. Le problème de ce stéréotype c'est qu'il est vrai ! Et c'est précisément ce qui renforce la domination qu'on connait. En quoi les qualités énumérées ci-dessus serviraient les femmes si elles ne se lancent jamais dans l'action, le mouvement ? Tant qu'on en restera là, les femmes ne pourront jamais récolter les fruits de leur réflexion. On pourra toujours bêler sur les qualités intrinsèques des femmes, leur supériorité morale, elles resteront dans l'ombre.

En conclusion, je ne crois pas qu'il y ait une manière spécifiquement féminine d'exercer le pouvoir. Ce qui vaut pour les hommes, la diversité des modes d'exercice, devrait s'appliquer aux femmes. On devrait aussi accepter l'idée que des femmes puissent avoir un comportement moralement discutable. C'est peut-être la question du rapport qui existe entre l'exercice du pouvoir et le caractère propre à chacune ou chacun qui est à interroger. Prétendre et revendiquer le contraire, c'est renoncer à promouvoir les femmes. D'ailleurs, pourquoi offre-t-on aux petites filles des jeux de société, des dînettes et des poupées quand on offre aux garçons des panoplies de zoro, des voitures téléguidées et des accessoires de sport ? Les petites filles sont éduquées pour penser et les petits garçons pour agir. Et à l'âge adulte, ça donne quoi ?

Je n'ai pas réussi à convaincre Marion. Pas cette fois du moins.

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